Joaquín Ferrer, Six décennies de créations
Du 29 mai au 25 juillet 2020
Joaquin Ferrer9
Joaquin Ferrer
Cuba
1928-2022
Surréalisme
Joaquín Ferrer, né le 4 octobre 1928 à Manzanillo (Cuba) et mort le 25 mars 20221 dans le 14e arrondissement de Paris2, est un artiste peintre, dessinateur et graveur lié au mouvement de l'abstraction lyrique.

Après avoir étudié à l’École des Beaux?Arts de La Havane, il fait l’objet chaque année, entre 1954 à 1958, d’une exposition personnelle au salon annuel du Musée d’Art moderne de la capitale cubaine. En 1960, le Ministère de l’Éducation lui accorde une bourse pour aller étudier l’art à Paris. Son voyage prend un caractère décisif, car l’artiste décide de s’y installer et y réside toujours. En 1968, sa première exposition parisienne préfacée par Max Ernst a lieu à la galerie Le Point Cardinal qui va désormais présenter régulièrement son travail.

« […] Quant aux jeunes, je les plains. Comment n’ont-ils pas l’impression que tout a été fait avant eux ? On a tort d’en faire des dieux avant même qu’ils aient eu le temps de s’exprimer. L’un d’eux, Ferrer, est un peu ma découverte. Loin du Pop Art, du Mec’Art et de leurs succédanés, il me paraît profondément authentique […] »

— Max Ernst3

Il est exposé en France à la Fondation Maeght, au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris et en Europe (Belgique, Suisse…). En complément de son travail de peintre, Joaquin Ferrer a aussi développé un œuvre important de graveur en illustrant de nombreux ouvrages de poètes et d’écrivains. Le style de Joaquin Ferrer tend vers l'abstraction lyrique, avec des figures construites comme des casse?têtes qui ne sont pas sans rappeler les arts premiers4.
Biographie
Naissance (1928)

Joaquín Ferrer Marquines est né le 4 octobre 1928 à Manzanillo, petit port de pêche de la pointe orientale de Cuba. Par suite d’une erreur administrative, cette date de naissance est parfois donnée comme le 4 juillet 1929. Son père, Joaquín Ferrer Herrera, exerce, comme ses ancêtres, le métier de tailleur. Sa mère, Altagracía Marquinez López, élève une famille de quatre enfants, deux garçons et deux filles5.
Jeunesse (années 1930-1940)

Le jeune Joaquín va à l’école primaire puis à l’école supérieure de Manzanillo. Très jeune, il se plaît à dessiner et à copier des tableaux. La présence américaine à Cuba se traduit par un clivage avec le reste de la population plus pauvre, mais les enfants n’en souffrent guère. Son père souhaite que l’adolescent reprenne la tradition familiale mais celui-ci est de plus en plus attiré par les arts. En 1948, il travaille à la Compagnie des chemins de fer. Fasciné par l’aviation, il prend des cours de pilotage mais il y renonce dès ses premières expériences pratiques5.
La Havane (années 1950)

Avec l’appui de son oncle, contre le gré de ses parents, il s’inscrit à l’École des beaux-arts de San Alejandro à La Havane. Il se lie à un autre étudiant, Agustín Cárdenas. Avec quelques autres élèves, il est hébergé et nourri à la prison du Castillo del Príncipe, près de l’école, commodité réservée aux étudiants impécunieux. À cette époque, il fréquente déjà, à l’extérieur de l’école, un autre futur peintre, Jorge Camacho. Leur aîné, Wifredo Lam, lui conseille de renoncer aux cours de l’École des beaux-arts, selon lui peu utiles. Joaquín Ferrer suit cet avis. En 1954, il montre ses œuvres pour la première fois au Salon de peinture du Musée d’art moderne de La Havane, et dans d’autres capitales latinoaméricaines. Il épouse Gina Pellón Blanco dont il se séparera et divorcera officiellement en 1971. Première exposition personnelle en 1955 à la galerie La Rampa, à La Havane puis en 1956 à la galerie Lyceum et en 1957 à la galerie Color Luz. Il travaille au Musée d’art moderne avec Cárdenas et Estopeñan et dans une petite galerie, Centro de Arte Cubano, en face de la cathédrale. Il réalise des gravures et, au Musée d’art moderne, une mosaïque dont une coquille dépare la signature en Ferret. La révolution de 1958-1959 à Cuba fait grand bruit dans le monde. En 1959, il reçoit une bourse du ministère de l’Éducation pour lui permettre d’étudier à l’étranger. Embarqué sur la « Reina del Mar », il arrive à La Rochelle le 8 décembre et se rend à Paris5.
Paris (années 1960)

À Paris, le monde intellectuel est en pleine effervescence pro-cubaine. Il loge à la Cité universitaire ; Lam et Cárdenas l’accueillent et le conseillent. La bourse mensuelle de 100 dollars est irrégulière mais la Maison de Cuba est tolérante. Il visite avidement les musées et les galeries de Paris et prend des cours de français à l’Alliance française. En 1961, il expose parmi les « Artistes cubains contemporains » à la galerie du Dragon puis à la galerie Epona. La Maison des jeunes de Clichy expose « Cuba et Cubains » et en 1962 dans l'exposition collective « Art latino-américain » au Musée d’art moderne, à Paris. En 1963, il participe à la IIIe Biennale de Paris au Musée d’art moderne. Lors d’une exposition collective au cinéma-galerie Le Ranelagh, premiers contacts avec le surréalisme. Il s’installe dans un atelier à Pigalle. Pendant près de deux ans, un groupe d’amateurs lui verse individuellement de quoi survivre. Première exposition à la galerie Maya à Bruxelles, et aux Pays-Bas. Il expose dorénavant régulièrement à la galerie du Dragon et dans de nombreuses expositions collectives et des salons : Réalités nouvelles, Grands et jeunes d’aujourd’hui, Comparaisons, etc. Il revoit fréquemment d’autres Cubains de Paris dont Alejo Carpentier. Il rencontre André Breton, Jean Benoît et Édouard Jaguer à la galerie L’Œil lors de l’exposition « L’Écart absolu ». Il rencontre Alain Bosquet par l’intermédiaire duquel Max Ernst demande à le connaître. En 1967, participant à l’exposition « Artistes solidaires d’Israël », il entre en contact avec les membres du Comité d’honneur, Max Ernst, Joan Miró, André Masson et Marc Chagall. Ernst visite son atelier et achète trois peintures puis invite chez lui Jean Hugues, Alexandre Iolas et Bertie Urvater. Hugues lui demande rendez-vous le lendemain et lui propose une exposition dans sa galerie, Le Point cardinal. L’exposition du Point cardinal est préfacée par un dessin-collage légendé de Max Ernst. Les révoltes étudiantes de ce mois de mai n’entravent pas le succès commercial de l’exposition. C’est le début d’une fructueuse collaboration. Il sera mensualisé et régulièrement exposé pendant dix ans. Sa fille Monia naît en décembre 19685.
Années 1970 - 1980

L’existence du peintre est désormais égale. Installé boulevard Brune depuis 1977, il épouse Anne Jézéquel (décédée en 1993), la mère de sa fille, en 1978. En 1979, il est naturalisé français. Il se passionne pour l’art extra-européen. Son quotidien se passe dans son atelier ou en contact avec ses amis : Lam, Ernst, Camacho, Cárdenas, Matta, Miró, Luca, Bosquet toujours fidèle, et beaucoup d’autres. Il voyage (Mexique, Italie, Belgique, Espagne, Pays-Bas) et passe fréquemment les vacances d’été chez Urvater à Palma de Majorque. Les expositions personnelles se succèdent : au Point cardinal, mais aussi à Genève (Engelberts), Bruxelles (Epsilon), Lima (Camino Brent)5…
Années 1990 - 2000

Sa fille Aïa naît en 1992. Il se marie avec Christiane Créteur en 1996, mère de sa fille5.

La monographie Joaquín Ferrer, l’imaginaire absolu dont le texte est dû à Lionel Ray paraît en 2001 aux éditions Palantines. L’organisation d’une exposition rétrospective de l’œuvre de Joaquín Ferrer est décidée à l’initiative de la Maison de l’Amérique latine en 20165.